POLITIQUE CONGOLAISE: SUIVISME, INTERET PERSONNEL ET TRAHISON DE LA CONSCIENCE 

Polycarpe okolongo 

En République démocratique du Congo, on observe un grave manque d’autonomie intellectuelle et politique dans les comportements collectifs. Nombreux dans des sphères publiques et privées, se désincarnent et se fondent dans la masse adoptant les choix politiques dominants, non par conviction, mais par opportunisme, par affinité ethnique ou par peur d’isolation. Ce mimétisme collectif touche toutes les couches de la société, allant des citoyens ordinaires aux les élites politiques et intellectuelles. 

En politique, il n’est pas rare de constater des vagues de soutiens et de ralliements massifs à chaque nouveau régime. Une fois qu'un nouveau régime s'établit, une majorité d’acteurs politiques et civils, tels que les députés, les anciens opposants, les fonctionnaires etc… abandonnent leurs positions antérieures pour se rapprocher du nouveau régime. La raison n'est pas une conversion idéologique, mais plutôt une quête d'accès aux ressources, aux postes au sein du gouvernement, marchés publics, protections et privilèges. La scène politique du Congo devient ainsi un lieu où la loyauté se négocie, comme des marchandises offertes au plus offrant, et où la parole publique perd toute valeur. 

Les éléments tribaux aggravent considérablement cette réalité. L'ethnicité devient une variable majeure dans la prise de décision en matière d'alliance politique. Nombreux sont ceux qui soutiennent un candidat ou un parti du simple fait qu'il vient de sa région ou parce qu'il parle sa langue. Cette logique entrave le débat d'idées et fragilise la cohésion nationale. Elle contraint des personnes à suivre aveuglément un groupe ou une pensée collective même lorsqu’elle est irrationnelle et contraire à l'intérêt général. 

Ce suivisme n’a pas épargné les intellectuels. Ceux qui, de par leurs formations et leurs statuts sociaux, devraient jouer un rôle de vigie critique, tombent également dans ce fléau. Certains universitaires, chercheurs et journalistes recourent aux discours à la mode tout en évitant toute perspective dissidente par crainte de perdre des avantages ou soutiens. Ils deviennent complices du système, jouant aux  défenseurs plutôt qu'aux contrepoids au chaos. une soumission du savoir au pouvoir menant à une rareté de la pensée critique.

 Dans un contexte comme celui-ci, demeure un  manque de la substance de la démocratie. L’absence de conviction et la crainte d’isolement illustrent bien l'absence d’indépendance dans le raisonnement et la prise de décision de chacun, soumis indistinctement aux contraintes sociales. Ni les institutions, ni le discours public, ni l'instabilité chronique ne sont susceptibles de s'affranchir d'une mentalité de soumission immédiate à la majorité en raison de certains intérêts. 

Ce mimétisme collectif, ancré dans des logiques tribales et économiques, est un blocage conséquent au développement de la politique congolaise. Il démontre comment les individus ont renoncé à la liberté de pensée pour un confort immédiat ou un sentiment d'appartenance. Se libérer de cette logique requiert la réhabilitation de l’esprit critique, un courage moral, ainsi qu'une volonté de faire prévaloir la vérité et la justice sur des intérêts éphémères. Tant que cette révolution mentale n'aura pas lieu, la RDC restera prisonnière de ces réflexes grégaires.